Poésie
2005 - 2014
Dans tous les arts que je pratique, j'aime tout autant m'attacher à la tradition que me lancer dans l'expérimental. J'ai donc imaginé composer des poèmes à l'aide d'un logiciel tableur ! outil plus normalement employé par les comptables que les bardes… Du point de vue créatif, ce ne fut pas un gadget, mais bien un outil spécifique laissant sa marque dans le résultat final. Par exemple, pour la composition 4, Conjugaisons, cela m'a permis de matérialiser facilement la logique du système de combinaisons entre les personnes, des verbes et des interprètes. C'est l'algorithme qui génère le rythme poétique. J'en présente ci-dessous les 3 grilles. Ce projet date de 2005 et, après diverses expérimentations pour tirer un bon parti du principe de l'emploi de ce logiciel – plus destiné aux chiffres ingrats qu'aux Belles Lettres –, j'ai pu attaquer l'écriture de quelques morceaux ; les premiers enregistrements ayant lieu en février 2006. Quelques tentatives de mise en forme furent des échecs. En mars 2011, j'ai repris le flambeau en mixant le morceau 4, avec plus de satisfaction. Par contre, l'emploi du tableur donne au texte poétique un aspect visuel qui n'est guère excitant. De fait, c'est très rébarbatif à lire. Peu importe, et même tant mieux ! car l'art poétique est d'abord oratoire et c'est donc à l'écoute (plus qu'à la lecture) que je t'invite pour apprécier cette suite de 12 pièces de 5 minutes chacune (figure imposée), faisant un ensemble d'une heure. Pour l'heure, il n'y en a que trois "dans la boîte", mais les autres suivront... en leur temps. Le titre évolua ; d'abord : Psalmodies – voulant être assez incantatoire puisque résolument sonore, puis : Psalmaudites (Psalmes maudites) – voulant quelque chose d'assez élégiaque, et enfin : Sales Mots Dits – voulant plutôt ruer dans les brancards du "bon goût"... La chose pourra paraître prétentieuse, mais c'est bien le principe de l'expérimentation de l'être. En 2013, j'ai commencé à y ajouter des images vidéos, plus pour une facilité de diffusion (via YouTube) que par nécessité. Je préconise une écoute des versions audio dans le noir (ou la pénombre), pour éviter les perturbations matérielles parasitant l'imaginaire ; sans doute en buvant un (ou deux) verres de vin, pour mieux ouvrir sa sensibilité. |
Interprètes : Erwan Badin, Liza Pichard, Solenn Portanguen, Petrus.
Début :
On comprendra assez vite que la version papier n'a guère d'intérêt en elle-même, si ce n'est celui similaire à la lecture d'une partition musicale. « Seul compte le chant » comme l'a si bien écrit un poète ami (voir ici). On y verra quand même comment le tableur a pu être d'une aide précieuse à la conception et la mise en forme d'un texte de la sorte. Chaque fragment fut enregistré plusieurs fois, sur des intonations diverses, et il ne fut pas simple d'en extraire une cohérence, parmi les possibles. J'en profite pour remercier grandement mes interprètes pour leurs patience et implication, sans parler de leurs belles capacités à restituer ce que toi seul/e comprendras. Quand j'eus mixé les voix, nues, j'ai aimé le travail quasi obligé de l'imaginaire, à l'écoute, trouvant que la stimulation fonctionnait bien. Cependant, c'eut sans doute été trop sec, austère et froid pour une diffusion à un public qu'on souhaite toujours le plus large possible. J'ai donc procédé à une mise en situation sonore, optant pour un environnement plus homogène que pour les deux précédents (dans l'ordre de finalisation : 12-Va et Viens et 4-Conjugaisons). Ce pourrait être dans un sombre labyrinthe (le poème étant lui-même labyrinthique), ou les ruines d'un monde perdu, ou un outre-monde infernal. C'est d'ailleurs cette atmosphère que j'ai voulu donner à la vidéo (octobre 2014). Pourtant, je reste un peu perplexe, voire dubitatif, quant à une trop forte détermination des habillages sonore et visuel, lesquels produisent un effet certain, mais risquant de dénaturer le propos en le confinant dans une atmosphère trop spécifique et assez stéréotypée (pouvant aller jusqu'au cliché). Néanmoins, c'est une approche qui n'est pas incongrue et je la garde et la présente pour ce qu'elle vaut (compte tenu des réserves évoquées). J'aime assez l'idée d'en faire une ou deux autres versions, très différentes, gardant les voix telles quelles, ne changeant que l'ambiance. Il me faut encore dire un mot sur le sens de ce texte. Il va de soi que le propos principal est de solliciter l'intimité de l'auditeur/trice. Cette intimité m'est inconnue, mais, au-delà du sens des mots entendus, j'essaye de t'inviter à une sorte d'hypnose introspective, histoire de passer la lampe là où il n'y a pas de lumière (formelle). On est dans la déstructure. À chacun sa vision. La mienne, à l'écriture, fut plutôt orientée sensuelle et spirituelle, dans une association qui m'est chère, explorée sous divers aspects – dans l'ensemble des Sales Mots Dits, et par ailleurs –, à portée de l'âme, infiniment, et des sens (qui en ont, du sens), dans un momentané intense. Certes,
l'ambiance à de quoi inquiéter, parfois même être
angoissante, mais c'est pour symboliser une fragilité devant
une situation d'inconnu total, qui n'est donc pas forcément tragique,
pouvant tout aussi bien être merveilleux ! Dans mon esprit, on
est dans un enfermement ; à savoir une sorte d'enfer, qu'il soit
réel ou mental ; à savoir un entr'aperçu des couches
profondes de notre nature. Les voix sont multiples mais rien n'exclut
non plus la solitude... ni bien sûr les rapprochements d'un érotisme
« salutaire ». L'obscurité ne révèle
rien (à la raison), sauf ce qui est compréhensible (à
l'esprit).
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Stimmen,
Stimmen. Höre, mein Herz, wie sonst nur Heilige hörten:
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Interprètes multiples.
en cours d'enregistrement
en prévision
Interprètes : Erwan Badin, Liza Pichard, Solenn Portanguen, Petrus.
Ce morceau est construit sur un système : 3 parties variant les personnes des temps du verbe aimer : je, tu, il ou elle, et du pronom suivant : moi, toi, lui, elle. Dans chaque partie, 12 sous-groupes thématiques : sensoriels et sensuels. Enfin, il fallut organiser la distribution également répartie entre les interprètes, deux hommes et deux femmes, et toutes les possibilités (ordre et partenaire). Le tableur se révéla très efficace pour me faciliter la tâche, car, si j'aime les systèmes, les appliquer (sans erreur) est une affaire plus complexe. Enregistré en mars 2006 (chaque interprète séparément), ce n'est qu'en mars 2011 que j'ai découpé et structuré les 576 fragments de paroles pour que ça tienne dans le strict format des 5 minutes. J'aime bien la variété des interprétations dont aucune n'est vraiment en rapport avec une autre. Cela créé des décalages auxquels je suis sensible, sans que l'ensemble n'en soit affecté, ne trouvant pas pour ma part son aspect final trop "fabriqué". À chacun d'apprécier... Solenn fut assez "détachée", un peu ailleurs et sans émotivité particulière, laissant aux mots seuls le soin et le loisir de montrer (ou pas) leur mesure. Enregistrant à sa suite, j'ai choisi – en regard amoureux du contraste – un registre plus forcé, outrancièrement théâtral, frisant le grotesque (au sens propre)... car on est bien ici dans une comédie de masques ! où mon emploi (naturel) est plutôt celui du barbon – souvent ridicule, mais aussi touchant. À contre-pied des précédents, Liza s'exprima avec un naturel très doux et plein de fraîcheur, étant dans l'ambiance mais sans en faire trop, avec la simplicité et malice des fausses ingénues. Erwan ferma le bal en variant les registres avec tout son talent de comédien (le seul à l'être du groupe), gardant toujours l'équilibre d'une subtile expressivité des nuances. Pour l'illustration sonore, j'ai hésité entre diverses ambiances, pour finalement en mixer 4 très différentes (en correspondance aux interprétations) : un tourbillon d'eau, grave (son ralenti) ; un brouhaha hétéroclite (de café), montant progressivement jusqu'à couvrir la parole intelligible, dans une sorte de vacillement hypnotique soutenu par la rythmique assez lente et minimaliste d'une batterie jazz et la suave mélopée de flûte indienne (d'Amérique du Nord), sachant aussi monter en présence (aussi discrète que nécessaire) puis s'effacer... sans se départir d'une énigmatique élégance. |
Conjugaisons en audio Conjugaisons en vidéo |
Texte compet :
en prévision
Interprètes multiples.
en prévision
Interprètes : Petrus.
en prévision
en prévision
en prévision
Interprètes multiples.
en prévision
en prévision
Interprètes : Fabienne Janin, Erwan Badin.
Ce poème est directement inspirée de la chanson de Colette Renard : Les nuits d'une demoiselle. Au simple monologue féminin, j'ai voulu introduire un dialogue de couple, frisant la "scène de ménage" – approche sur un ton de reproche –, en invite à des pratiques d'autant plus coquines qu'elles ne sont pas très explicites puisque décrites en des termes imagés presque abstraits, utilisant un vocabulaire très largement inventé (reprenant parfois quelques vocables anciens). Je n'ai pas pu caser le texte complet dans format des 5 minutes, mais le reproduit in extenso ci-dessous (avec en gris le texte non enregistré) ; il sera intégré en entier (en dialogue) dans la pièce de théâtre : le Mariage de Crépon (en cours d'écriture). Cette composition ne doit rien au tableur, mais l'on verra que c'est juste symétrique et est interprété en parallèle. Enregistré en octobre 2006, j'avais fait un premier mixage qui ne me satisfaisait pas plus que cela. Reprenant ce chantier en mars 2011, j'ai supprimé tous les effets sur les voix et réajusté les volumes de celles-ci de façon beaucoup plus minutieuse. Pour l'ambiance sonore, j'ai d'abord cherché un tonalité moyenâgeuse qui ne m'a pas convaincu, pour reprendre mon premier mélange (remixé) : une sorte de violon à deux cordes dont je joue en tenant le son en continu, variant peu et en forçant sur les harmoniques ; un gnawa marocain ; un chant de la taïga sibérienne. J'y ai rajouté une ambiance de forêt amazonienne, pour augmenter les contrastes continentaux. Pour autant, cette version n'est pas encore totalement convaincante à mon goût. L'interprète féminine joue bien le texte, mais n'a peut-être pas les caractéristiques physiques adéquates au rôle, plus proche d'une marchande des quatre saisons. Il manque aussi une atmosphère plus vivante et crédible, dans la spatialité. J'envisage donc de refaire ce morceau (et le changer d'ordre dans l'album), mais, d'ores et déjà, cette version est et demeure tout à fait dans la ligne de ce que j'ai voulu. |
Va
et Viens en audio
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