Avis à la Population !

13 / en Avant la Musique !

15 décembre 2013 - 16 avril 2014 / Photos : Internet

 

On ne dira jamais assez tout le mal que le rythme a fait à la musique...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il y a bien sûr ici une part de provocation dans cette attaque frontale (salutaire) envers beaucoup de ceux qui se disent « musiciens » du moins ceux qui sont restés esclaves de ce qu'ils ont appris ; thème qui m'est récurant, développé sous diverses formes, comme la Chose à Dire 77 : « L'école, c'est pour les scolaires ». Cette connaissance scolaire, plus apprise que comprise, limite la pensée de manière tragique ! exactement comme s'ils jouaient avec des menottes. C'est une chose d'apprendre des bases théoriques, mais une autre de se limiter à cela – et l'on connaît bien le phénomène en blues, jazz, rock, etc.

Presque tous les musiciens sont incapables de penser (pour créer) autrement qu'au travers de grilles mentales de règles préétablies (l'antithèse de l'art !), formatant totalement leur créativité – qui donc n'en est plus, puisqu'à un moment donné, il faut bien inventer, un minimum, et donc obligatoirement aller à l'encontre des règles ! C'est ce qui explique le nombre infime d'artistes novateurs et la masse flasque de suiveurs, de faiseurs là où on leur a dit de faire… Le dogmatisme a de multiples visages, et je le gifle partout où je le rencontre.

L'homme est un animal – et l'artiste en est le totem – qui cherche en permanence, ne se satisfaisant de rien et s'intéressant à des problèmes qu'il aura lui-même inventés, par gratuité intellectuelle, pendant que les pantouflards de la pensée restent au chaud… en dehors (de l'art), car ils ont peur de s'enrhumer le cerveau dans les courants d'air élévateurs de l'esprit.

Concrètement, si le rythme était aussi essentiel que d'aucuns le pérorent, autant laisser jouer un ordinateur (plutôt qu'un humain), lui seul pouvant le tenir parfaitement, aussi longtemps qu'on voudra ; lui seul n'étant pas limité par le souffle ou l'écartement des doigts, etc. Or aucune machine n'est à même de rivaliser avec la sensibilité (humaine), laquelle impose précisément une grande inconstance ! c'est-à-dire une constante variation de la constance.

La question est dans la question elle-même (comme souvent) : avant de savoir si l'on peut créer une musique sans rythme, la question est de savoir si l'on a le droit de se poser la question ! Or tous les musiciens à qui j'en ai fait mention ont tous eu la même réaction suffoquée devant une telle proposition hérétique… C'est bien là le syndrome du scolarisme (formalisme scolaire) : il est interdit d'imaginer quelque chose en dehors du champ des valeurs académiques. Je trouve cela artistiquement et intellectuellement navrant, parce qu'aucun d'entre eux n'y a seulement réfléchi 2 secondes, puisque cela va tout bonnement contre les sacro-saints principes sclérosés de ceux qui vont de l'avant en faisant : « Une, deux ! » (voire pin-pon), bien en rythme.

Pourquoi faut-il éternellement que ceux qui émettent des idées neuves (quel que soit le domaine) se fassent systématiquement traiter de fous ? C'est exactement comme si l'on disait que l'on ne peut pas peindre sans couleurs, que l'on ne peut pas écrire sans langage ou que l'on ne peut pas danser sans tutu. Heureusement pour la civilisation que des créateurs – incluant les chercheurs scientifiques – se sont posés certaines de ces fameuses questions mal pensantes.

Les musiciens du temps de Beethoven refusaient d'interpréter ses quatuors, parce qu'ils disaient que ce n'était pas de la musique ! air maintes fois entendu depuis pour à peu près tous les genres musicaux nouveaux (jazz, rock, techno, rap). L'éditeur de Chopin corrigeait sur ses partitions les insupportables dissonances… Les amis artistes de Picasso disaient que sa toile : Les Demoiselles d'Avignon était « l'œuvre d'un fou et qu'on allait bientôt le retrouver pendu derrière… » Etc., etc.

Or donc j'ose dire que le rythme est une expression primitive, absolument efficace pour flatter les instincts du même nom, mais qu'on a le droit de pousser plus loin le curseur de la création, précisément au delà du champ de la conception commune (pour ne pas dire vulgaire). Bien sûr qu'il y a une vérité dans le rythme ! (voir ici) mais aller au-delà, ça ne veut pas dire en deçà. On peut même y trouver quelque chose de plus grand que la vérité ! Dans le domaine vital, il y a la pulsation, où s'anime l'humain ; mais aussi, l'impulsion ! (Big Bang), laquelle est du ressort du divin.

Je ferais la comparaison avec la peinture abstraite (jusqu'à la monochromie), laquelle a bien dû sortir du cadre étriqué de la basse représentation, pour tenter de toucher à une forme plus pure puisque dénuée de matérialisme lourdaud – et je dis ceci sans être un peintre abstrait, genre qui ne m'intéresse pas beaucoup... (à part les tous premiers artistes).

La nature est pleine de musiques sans rythme ! et c'est quelque chose. Je pense aussi, par autre exemple, en œuvres humaines, aux trompes tibétaines, lesquelles n'ont pas de rythme à proprement parler, tout en s'écrivant sur des partitions (spécifiques et incompréhensibles aux non-initiés). Et il y a bien entendu, plus proche de nous, certains morceaux de musique concrète – en nous souvenant aussi du fameux anti-accord absolu ! « la musique des sphères... » d'Antoine Delafoy, via les pères Michel (Audiard et Magne).

Bref, il y a là une terra incognita où je compte personnellement avoir l'avantage d'y faire quelques tours – lesquels ne seront pas des ronds.