Labyrinthe XI


 

PREDERIAMB
AR EN DEULIN
REVO ELSE
OLL ER GROUEANS
CHELEUET
méditons
à genoux
ainsi soit-il
toute la création
écoutez

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

60 × 60 × 6 cm - bois, peinture base aqueuse, dorure ; vernis mat. - déc. 2012

 

Voici longtemps que j'aime la poésie de Bleimor, alias Jean-Pierre Calloc'h, barde au cœur noueux de l'île de Groix (toute proche d'où je vis), lançant ses vers bretonnants au vent debout de la foi liant les fidèles de ce vieux monde et des autres, où qu'ils soient. Son accent rocailleux des schistes bleus fait échos au tumulte des sombres eaux salées fouettant l'île de sempiternelles bénédictions dont la pâle écume ne purifie (peut-être) plus que quelques goélands argentés planant comme des âmes égarées, ou de doucereuses étendues de bruyères, processionnant leurs violaceries mystiques de par le ras des landes mémorielles que seuls de lointains ancêtres foulent encore de leur ombre lourde, lorsque la lune est basse.

Il ne nous reste qu'un recueil de ce saint, trop pauvre pour porter l'auréole, dont l'intense lueur brille pourtant comme un phare salvateur, répandant sa singulière clarté dans l'épaisseur d'un monde devenu opaque au mystère. J'en ai extrait les cinq bribes de l'usage que j'ai pris pour animer les anguleuses sinuosités de mes constructions labyrinthiques, solidifiées dans une profonde immatérialité.

J'en ai également repris le titre, Ar en deùlin (à prononcer : "are ène deuwline", selon l'intonation groisillonne), signifiant littéralement : sur les deux genoux, parce qu'un seul ne suffirait pas à la vraie piété, cette posture entre-deux gardant encore quelque élégante noblesse adoubée par l'orgueil. Que diable ! affaisse enfin ta suffisance ! homme de peu de force… et laisse aller ton complet abandon à la belle humilité pleinement agenouillée, ne semblant ridicule qu'à l'œil creux des aveuglés par leur arrogante superbe. Miserere nobis.

C'est le même chant et la même écoute exprimés dans des accents ressemblants par un autre cher poète d'un autre isolement, Rainer-Maria Rilke ; et ce n'est pas un hasard s'ils sont réunis dans ma série d'animations infographiques : 1913, année poétique en Europe.

Techniquement, j'ai voulu cette stèle dans un simple aspect granulé granitique, employant à cet effet une peinture (du commerce) spécialement conçue pour. Contrairement aux autres labyrinthes, les lettres du texte sont fixées sur le plat de la tranche des cloisonnements, comme si elles y avaient été sculptées. À noter enfin que le plan symétrique trace un parcours unique et infini.

  

Détail :

 

Plan de conception :

 

 

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