des Choses à Dire
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Avril 2009. Contre-plaqué, papier imprimé, caisse de radio, tissus, fil & aiguille.
L'aspect ancien de ce poste de radio m'a très vite orienté vers la période de la Seconde Guerre Mondiale où ce média joua un rôle important, particulièrement en France avec la radio de Londres, servant de cordon ombilical avec la Liberté, la démocratie et l'esprit de Résistance à l'Occupation. C'est pourquoi j'ai réalisé une première version (voir ci-dessous) ayant comme texte : « Ici Paris », en pendant au : « Ici Londres », opposant le maréchal au général. Bien sûr, d'une part, Pétain n'était pas à Paris, et d'autre part, l'obligation du port de l'étoile jaune est une ordonnance allemande, intervenant presque un an après l'interdiction pour les Juifs de posséder une radio… Ceci étant précisé pour que l'on comprenne bien que je ne fais ni amalgame, ni confusion, mais une synthèse de facteurs arbitraires adaptés pour une vision artistique. Le parti pris est inévitable dans un cadre aussi restreint censé rendre au mieux une configuration aussi vaste. Mon propos n'est donc pas de restituer l'Histoire, mais d'en faire sentir un certain poids, d'en rendre sensible certains aspects ; et notamment le rôle de Pétain (en opposition à celui de De Gaulle) dont la politique de Collaboration avec les nazis représente l'alliance de la bêtise avec la barbarie. De même, j'essaye de représenter plus particulièrement encore la persécution des Juifs, par ce biais de l'étoile (avec le fil et l'aiguille) qu'il va donc falloir se coudre sur le cœur, comme signe d'infamie. Cela n'a pas l'air si terrible, à première vue, mais après avoir fabriqué moi-même cette étoile (coupée dans un vêtement que j'ai porté), je me la suis posée sur la poitrine et me suis regardé dans la glace, pour voir. Je n'oublierai jamais mon regard d'alors. Je t'assure que si tu le faisais, tu ne ferais pas le fier… et, juif ou pas, tu n'aurais pas envie de sortir dans la rue avec "ça". Le fait d'avoir à se la coudre soi-même est aussi très vicieux, obligeant la victime à participer activement à son tourment. Il y a là quelque chose de l'ordre de l'automutilation forcée. On est au début du processus (en France) et c'est aussi cela que je voulais montrer : cet instantané où, en théorie, bien des choses sont encore possibles, bien des gens sont encore vivants. Finalement, j'ai opté pour ne mettre aucun texte ; sauf que je considère les trois boutons de la radio comme des points de suspensions, faisant office de phrase et de titre. C'est tout à fait approprié et bien suffisant. Mettre des mots là-dessus, résumant la situation à une petite phrase, me parut dérisoire, voire indécent. Ici, la Chose à Dire est silencieuse, mais ça parle d'autant. Lorsque je fis le grand fond (en septembre 2016), le rappel de la tenue des martyrs déportés me paru aller de soi, en toile de fond des minables discours d'une pensée incontinente véhiculée dans les discours du maréchiottissime Pétain. Comme en général, et en particulier pour les autres pièces de cette série, le filtre du support (photo, écran) fait perdre à l'œuvre beaucoup de son intensité. Une œuvre d'art plastique possède de façon intrinsèque ce caractère unique qui lui confère non pas un aspect élitiste mais terriblement humain. |
Détails :
Animation en vidéo :
J'avais trouvé, il y a longtemps, l'enregistrement de Pétain pris d'une quinte de toux avant un discours ; cela s'imposait ici. Je l'ai mixé en boucle et ça m'inspira les distorsions d'images. Pour la partie suivante, il m'eut fallu une caméra pour mieux rendre l'effet voulu, lequel est approximatif et insatisfaisant, ayant dû faire avec les moyens du bords (un petit appareil photo bas de gamme). Je reprendrai sans doute cela un de ces jours (où j'aurais le matériel nécessaire). |
Première version :